Note de lecture

8 Août 2016

Penser l’islam

Michel Onfray,

Grasset, 2016,  169 p.

Un petit livre mal fichu, assemblé à la hâte à partir de textes hétérogènes, un livre provocant, comme son auteur nous y a habitués. Mais aussi un livre riche d’analyses que tout libre penseur, en principe ennemi du dogmatisme, de la pensée unique, et donc de la pensée-réflexe, pourrait méditer, quitte à en ressortir conforté dans ses idées initiales.

L’auteur y confesse le bricolage qu’est ce livre, assemblé à la hâte après le 13 novembre 2015, où l’on retrouve des thèmes qui lui sont chers, qui lui permettent d’envisager l’islam, mais aussi les musulmans, mais aussi ceux qui les regardent et en parlent, suivant une variété d’angles d’attaque (mot choisi à dessein). Pêle-mêle :

La France, par ses interventions militaires depuis 1991, a tout fait pour attiser contre elle les ressentiments des  pays musulmans où elle a causé la mort de beaucoup plus de civils que ne l’ont fait les terroristes qui ont sévi récemment… que doit dire face à ce constat l’anti-militariste face à ses pulsions droitsdelhommistes ?

Se refuser à participer aux défilés comme « Je suis Charlie » pour ne pas cautionner l’indigne pantalonnade du Chef ( ?) de l’État défilant sur 50 mètres sur-protégés en compagnie d’alter egos pas très propres sur eux en matière d’éthique politique et humaine… où étaient les dessinateurs massacrés quelques heures plus tôt dans cette récupération politique ?

Cerise sur le catho, pourquoi défendre bec et ongles une loi sur la laïcité qui administrait en 1905 une réalité géopolitique de la France face au monde d’où l’islam était absent, loi qui conduit aujourd’hui à laisser gérer les lieux de culte musulmans par des excitateurs stipendiés par de pays arriérés du culte et incapables, par leur langage même, de distiller quelque subtilité et hauteur de vue que ce soit du message coranique, si tant est que celles-ci existent ? Donc, l’État français devrait, selon M. Onfray, mettre son nez (et son argent… aïe) dans la création de mosquées et l’éducation de leurs ministres du culte… bien sûr, on a des réponses toutes faites à cet argument, mais…

Le message coranique : c’est là que le lecteur pourra reprendre le souffle qui lui aura peut-être manqué jusqu’ici… L’auteur se livre à une redoutable recension du Coran tel qu’il peut être lu par tout un chacun, mettant en évidence l’invraisemblable schizophrénie de ce texte dont on se demande comment on peut parvenir à le croire, tant il est incohérent. Son analyse conduit, preuves à l’appui, à l’idée qu’il peut exister (au moins) deux façons d’être musulman, pacifique ou sanguinaire, selon la cueillette qu’on fait de telle ou telle sourate. Comment gérer intellectuellement et philosophiquement un tel brouet ?

Enfin, Onfray plaide pour ses prises de position, nous rappelant qu’une approche critique de l’islam vaut systématiquement de la part d’une certaine ( ?) gauche ( ?), le badge de l’infamie (islamophobie, racisme, « pas d’amalgame », ah cette belle formule !, etc.) ; il nous rappelle enfin que de bonnes questions peuvent être posées dans ce champ par l’extrême droite, questions qu’il ne faut pas, par correction politique, évacuer, sans les réfléchir, d’un revers de main en raison (vraie) du fait que cette f(r)ange y apporte des réponses ignobles et, surtout, inefficaces…

En résumé, un livre qui agace, irrite, écrit par un athée sincère, qui peut alimenter débats et réflexion, à défaut d’adhésion, et pourrait éventuellement  nous prémunir quelques secondes du bashing-réflexe généré contre ces intellectuels que la presse bien-pensante a qualifiés de rouges-bruns, d’idiots utiles au FN, etc.

Alcide Carr

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