Laïcité : regardons comment les candidats à la présidentielle se positionnent face à l’école privée

5 Mar 2017

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Une enquête du CNRS assure dans une étude menée auprès de 4 269 établissements privés que les établissements catholiques financés par la puissance publique discriminent à l’inscription selon le patronyme des familles. Les chercheurs révèlent également que 45 % des courriels venant de Franco-Français ont reçu une réponse, alors que cela n’arrive que pour 32,5 % des Maghrébins[1].

La Direction de l’évaluation, de la prospective et de la performance (DEPP)[2] publie en novembre 2015 une autre enquête de chercheurs. En 2003 25% des collégiens du privé étaient issus des milieux défavorisés, contre 20% en 2015 alors qu’ils représentent 43% dans l’enseignement public. Du côté de la catégorie très favorisée, ils représentent 30% en 2003 des effectifs du privé, contre 37% en 2015 et seulement 19% pour l’enseignement public.

On a là une estimation chiffrée de cette « fuite » des familles aisées vers le privé, si souvent soupçonnée. Une troisième étude[3] de l’économiste Thomas Piketty, juge que « la ségrégation dans les collèges [a] atteint des sommets inacceptables » et pointe du doigt, à Paris notamment, « le rôle-clé joué par les collèges privés ».

Le secrétaire général de l’enseignement catholique, Pascal Balmant répond cyniquement: « Je crois à l’insuffisance d’une approche exclusivement statistique, qui conduit à une vision trop hâtive et abrupte de la réalité… »

Depuis quelques mois, le journal La Croix s’efforce de vendre les mérites présupposés de l’enseignement catholique et s’adonne à une vaste opération de publicité mensongère en dissimulant les résultats de ces enquêtes démontrant la ségrégation produite par l’enseignement sous contrat.

Le journal LA CROIX complice de l’enseignement catholique pour relancer la guerre scolaire :

Le buzz médiatique initié par LA CROIX fonctionne :

« L’Enseignement catholique présente mardi 28 février, à l’attention des candidats à l’élection, sa « contribution » pour l’éducation. Il entend parler de l’école « autrement », par-delà les « clichés », avec quelques maîtres mots : « Souplesse, autonomie, innovation, audace, respect, responsabilité, exigence, confiance ».[4]

Tout l’arsenal du vocabulaire humaniste est utilisé quand il s’agit de travestir par le discours la réalité du libéralisme. Les termes suivants sont couramment utilisés : dignité de la personne, communauté éducative, respect, dévouement, dialogue… Ainsi sont masqués les problèmes institutionnels et camouflés les conflits selon un mécanisme couramment utilisé dans la sphère politique ou ecclésiale. Il arrive que le vocabulaire humaniste se trahisse directement, par exemple quand est prônée la réussite individuelle et sociale comme valeur privilégiée.

La Croix indique pour qui voter

  • « Nous ne sommes pas hostiles à une évolution du 80-20 pour répondre au passage massif d’élèves du public vers le privé », nous répondait début février Annie Gennevard, secrétaire générale adjointe chez Les Républicains et membre de l’équipe Fillon. Objectif : « assurer aux familles une liberté de choix qui aujourd’hui n’est pas effective, puisque certaines d’entre elles ne peuvent pas inscrire leur enfant dans le type d’établissement souhaité ».
  • « Jean-Luc Mélenchon entend « réserver l’argent public au financement de l’école publique ». Comment ? En abrogeant la loi Carle (2009), qui oblige les villes et villages à verser un forfait communal pour la scolarisation d’enfants résidents dans une école privée située sur une autre commune. En revenant aussi et surtout sur la loi Debré de 1959, qui définit l’accord d’association avec l’État. »
  • « Au FN, longtemps promoteur d’un « chèque éducation » utilisable par les familles dans l’école de leur souhait… »
  • « Chez Benoît Hamon, on ne répond pas directement à une possible remise en question des accords Lang-Cloupet mais on dit vouloir travailler avec l’Enseignement catholique… »
  • « Enfin, contactée à plusieurs reprises, l’équipe d’Emmanuel Macron n’était pas en mesure, lundi 27 février, de préciser la position du candidat d’En marche ! dans ce dossier. »

Jacques Attali a peut-être quelques précisions importantes: « J’ai rencontré Emmanuel Macron il y a longtemps, puisque quand le Président précédent (Nicolas Sarkozy, NDLR) m’a demandé d’organiser la commission de réforme de l’économie française… »[5], la proposition n°6 de ce rapport Attali de 2008 était rédigée par EMMANUEL MACRON « Des “droits à l’école” seront attribués à chaque enfant et utilisables dans toutes les écoles : ce dispositif permettra d’établir une véritable liberté de choix, pour que chacun puisse bénéficier dans son voisinage d’écoles publiques et privées conventionnées. En pratique, l’État affectera aux parents une somme d’argent par élève. Chaque parent pourra l’utiliser dans un établissement public ou privé de son choix. » La suppression de la carte scolaire est finalement posée par le rapport Attali comme un préalable incontournable à l’instauration du chèque éducation.

Le quotidien Le Monde[6], indique aussi que « L’enseignement catholique veut peser sur la présidentielle » : « Reste à savoir quel accueil lui réserveront les candidats engagés dans la course à l’Elysée. Le suspense est relatif : du côté de François Fillon ou d’Emmanuel Macron, on peut s’attendre à ce que les notions d’« autonomie » et de « flexibilité » sur lesquelles le privé insiste, résonnent favorablement. Benoît Hamon, lui, n’a pour l’heure évoqué ce secteur de l’enseignement que pour l’enjoindre à s’associer au chantier de la « mixité sociale », à peine engagé. »

On le voit, de nouveaux champs de bataille, toujours plus sournois, s’ouvrent en permanence. Une guerre froide sur le terrain scolaire, sans cesse réactivée par les partisans de l’enseignement catholique, se déroule encore et toujours, sous nos yeux. Hélas, l’époque est à une omerta politique. Un silence religieux, organisé à droite, s’est installé afin de mieux masquer ce démantèlement de l’Éducation nationale. La gauche, par une atonie qui fait figure de complaisance, contribue par son invraisemblable passivité – connivence ? – à ce démantèlement. Son silence conforte la collusion d’intérêts entre libéraux et cléricaux pour séparer l’école de l’État.

L’Église demande finalement, à l’État de financer sa visibilité sociale, au gré de concessions et privilèges toujours plus nombreux. Heureuse non seulement, de maintenir ses « parts de marché », mais de se développer aujourd’hui sur le compte du contribuable. L’Église revendique ainsi, par le truchement de l’école, un développement continuel en vue d’une reconquête de son emprise sur les citoyens et les institutions. À la clef, un remariage forcé avec l’État.

Eddy KHALDI

1er mars 2017

ABC de la laïcité

ABC de la laïcité pour les jeunes

La République contre son Ecole

Main basse sur l’Ecole publique

Publiés chez DEMOPOLIS

[1] « Le CNRS juge l’enseignement privé discriminant » Le FIGARO 14 janvier 2014

[2] http://www.education.gouv.fr/cid106930/massification-scolaire-et-mixite-sociale.html

[3] http://abonnes.lemonde.fr/idees/article/2016/09/06/thomas-piketty-la-segregation-sociale-dans-les-colleges-atteint-des-sommets-inacceptables_4993003_3232.html

[4] 28 février 2017- LA CROIX : « Comment les candidats à la présidentielle se positionnent face à l’école privée »

[5] http://www.bfmtv.com/politique/attali-emmanuel-macron-a-le-talent-pour-etre-un-presidentiable-830701.html

[6] 28 février 2017- LE MONDE : « L’enseignement catholique veut peser sur la présidentielle »

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