Laïcité: voilà l’ennemi!

24 Oct 2008

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(texte envoyé par J.C. Canal de la Fédération Audoise des oeuvres laïques)

L’intervention mardi 14 octobre du cardinal Rouco-Varela au Synode des Evêques réuni à Rome mérite que l’on s’y arrête.

L’archevêque de Madrid, qui préside la Conférence épiscopale espagnole a repris une argumentation scandaleuse qui circule depuis pas mal de temps dans les milieux catholiques y compris en France: le rationalisme ayant remplacé la foi catholique aurait abouti au communisme et au nazisme. C’est présenté comme un enchaînement logique.

Le site de l’Observatore Romano le cite ainsi: «L’Etat moderne, dans sa version laïciste radicale, a, au XX siècle, abouti aux formes totalitaires du communisme soviétique et du national-socialisme»… «La postmodernité a aggravé la conception moderne de l’homme, de la société et de l’ordre politico-juridique dans ses aspects les plus négatifs, ouvrant la voie au nihilisme existentiel et à la ‘dictature’ du relativisme éthique».

El País du 16 octobre explique que le cardinal espagnol demanda la participation de l’Eglise à la vie publique et aux débats législatifs, pour s’opposer au laïcisme, à «la dictature laïque », source de dangers historiques. L’évêque anglican de Durham, observateur au synode, remercia Rouco de son analyse qui s’appliquerait aussi à l’Angleterre.

Ce n’est pas la première fois que j’entends ces accusations contre le «rationalisme», que l’on fait glisser facilement en une mise en cause de la raison elle-même. Trop de raison serait le danger à combattre, sauf si la raison est au service de la foi. Le Pape est virtuose pour développer ce lien de subordination de la raison, qui ne serait légitime que pour mettre en valeur la Vérité que la foi chrétienne exprime.

Mais il est à noter que la phobie antirationalisme dérive depuis quelque temps dans les prises de position des hiérarques catholiques en une désignation de la laïcité comme bouc-émissaire des maux de l’humanité. La baisse de la pratique religieuse en Europe, la perte d’influence d’un clergé jadis tout puissant, la diminution de l’emprise religieuse sur les jeunes et sur les adultes, tout cela contribue à leur faire vouloir contrer ce qui peut avoir provoqué ces résultats.

La France est en ligne de mire: la réussite de la loi du 9 décembre 1905 ayant institué légalement la séparation des églises et de l’Etat, en donnant une place précise à chacun n’a jamais été acceptée que du bout des lèvres. Rome veut limiter l’effet de contagion sur l’Italie, sur l’Espagne, sur d’autres pays européens.

L’argumentation politique ainsi développée porte sur les excès de la laïcité. On revient sur l’anticléricalisme de la fin du XIX siècle, négligeant le contexte d’alors et le comportement monarchiste de l’église catholique française. On accuse la laïcité de porter la raison sur un autel comme le fit la Révolution de 1789. Les Droits humains, qui font trop de place à la raison et aux individus, la liberté de croyance, heurtent la foi des théocrates qui ne veulent pas de liberté individuelle pour les autres.

Depuis Pascal, les raisons du cœur que la raison ne connaît pas s’opposent à la raison froide. Certains suivent alors un argument pendulaire que l’on est allés trop loin dans un sens et qu’il faut revenir à la foi. Sauf à réagir avec un rappel de ce qu’est la laïcité véritablement: elle ne sanctifie pas la raison pour elle-même mais elle fait appel à elle dans les comportements plutôt qu’à l’irrationnel.

La laïcité, je l’ai écrit tant de fois que je ne peux que me répéter, est la liberté pour les individus et pour les religions d’exister librement, mais sans imposer leurs diktats à ceux qui n’en veulent pas. La foi n’est pas incompatible avec la laïcité. L’enfermement sectaire ou celui communautaire, interdisant tout choix personnel libre, si!

La Laïcité n’a pas à être «ouverte» ni «positive»: elle est ouverture car ne refusant pas que ceux qui ont une foi l’exercent. Mais elle ne peut pas admettre une foi imposée, ni des fatwas contre ceux qui choisissent de vivre hors de telle ou telle religion. Elle ne peut pas admettre les pressions institutionnelles sur des citoyens libres.

Raymond BELTRAN

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