Hommage : De La Mettrie à Darwin

11 Sep 2009

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Julien Offray de La Mettrie est né à St Malo en 1709. Après avoir suivi des cours de logique, il opta pour la médecine et fut reçu docteur en 1733. Dès la fin de ses études il publia des traités sur l’asthme et les maladies vénériennes, puis il vient à Paris en 1742 en qualité de médecin des Gardes françaises ; il y fréquente les cercles cultivés et libertins de la capitale et prend conscience des mensonges véhiculés par l’idéologie dominante, surtout cléricale.

En 1745 il publie l ’« Histoire naturelle de l’âme » , ouvrage condamné par le Parlement à être brûlé, en même temps que les « Pensées philosophiques » de Diderot. Contraint de fuir en Hollande il y publie l’ « Homme machine » en 1747. Il se réfugie ensuite à Berlin où il devient lecteur de Frédéric II roi de Prusse, un despote certes, mais protecteur des intellectuels d’avant-garde, bien plus éclairé et tolérant que Louis XIV. Il est nommé membre de l’Académie royale des sciences ; il écrit son ouvrage le plus radicalement matérialiste : « Discours sur le bonheur » (1748) puis « Le système d’Epicure » (1750).

Il sollicite l’appui de Voltaire pour rentrer en France, mais meurt en 1751 à 42 ans.

La Mettrie a été persuadé très tôt que l’âme, au sens religieux, n’existe pas ; il nomme âme la faculté particulière de l’homme à raisonner (ce que nous pouvons appeler à l’heure actuelle le « logiciel du cerveau » *).

Aux théologiens de son époque, qui se déguisaient en philosophes, La Mettrie oppose ses observations de médecin.

Il a lu le « Manifeste » du curé Meslier (1664-1729) mais, alors que le matérialisme de Meslier n’était pas étayé par des connaissances scientifiques, les convictions de La Mettrie reposaient sur une solide culture en médecine, chirurgie, physique et chimie, ce qui lui a valu la considération des milieux européens les plus éclairés de son temps.

Allant plus loin dans sa réflexion il arrive à la conclusion que nous ne sommes que des animaux perfectionnés et que notre corps peut se décrire comme une entité purement matérielle. La conséquence logique est que rien ne justifie l’immortalité et les superstitions/religions qui s’y rattachent. Une autre conséquence est qu’il faut exalter les plaisirs du corps car le désir est l’affirmation de la vie, mais, à la différence de Sade (1740-1814) , son hédonisme naturel est tempéré par une rigoureuse morale sociale. La Mettrie a été un matérialiste radical et athée ; les tentatives marxistes de promouvoir sa pensée n’ont pas reçues grande audience en France, mais, par le biais du darwinisme et de la biologie moderne, il retrouve enfin son importance.

Dans un 18e siècle encore soumis aux pouvoirs obscurantistes

La Mettrie a été un précurseur, un penseur rigoureusement logique pour lui la philosophie est avant tout l’enseignement de la vérité, et ceci en dépit des risques. Sa pensée a permis le développement de la théorie de l’évolution de Charles Darwin (1809-1873). Maintenant qu’il est prouvé, par les dernières découvertes sur l’A.D.N., que nous partageons 98% de notre patrimoine génétique avec les grands singes anthropoïdes, les derniers combats des créationnistes américains ou turcs n’ont plus guère de signification pour la communauté scientifique internationale et le récit de la Bible, la Genèse, est relégué au rang d’une fable ridicule.

Le mépris de l’« homo religiosus » envers les animaux (dépourvus d’âme donc définitivement nos inférieurs !) est critiqué par les scientifiques du monde entier, disqualifié par les biologistes, les éthologues et même les ethnologues ; l’humanité prend conscience peu à peu qu’il n’y a pas de hiatus (interruption de la continuité) dans la chaîne vivante de la bactérie jusqu’à l’homme et que si nous sommes une exception « intelligente » dans la nature c’est la loi du hasard et de la nécessité.

Lorsque le disque dur de votre ordinateur est détruit, tous les programmes logiciels le sont également, il n’en reste pas de trace ; chez les organismes vivants (dont l’homme) c’est pareil : la raison, l’esprit, la pensée, tout ce qui est immatériel, est détruit si le support réel (le cerveau) est détruit, il n’en reste rien.

Bibliographie succincte :

La Mettrie : « Œuvres philosophiques » tomes 1 et 2, Fayard 1984.

Claude Morihat : « La Mettrie. Un matérialisme radical » PUF 1997.

J.S. Spink : « La libre pensée française de Gassendi à Voltaire » éditions sociales 1966.

Michel BOTTOLLIER

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1 Commentaire

  1. Patrick

    La Mettrie a effectivement marqué le marquis. Ce dernier a rêvé de rejoindre la cour de Frédéric 2 : sa femme jouant de la guitare, lui, versifiant.

    Le disque dur, le disque mou… Callicles. Heureux, cent fois heureux celui qui se maintient dans l’avant goût des plaisirs. Les personnages de Sade c’est du conte de fées pour adultes. Ca a
    marché; le problème, ce qui gène le lectorat, c’est pourquoi ça a marché. Ce que vous écrivez est très bon !

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