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Conte où le loup écrit aux petits cochons

17 Jan 2019

Une lettre adressée aux trois petits cochons par Maître loup, à la suite des révoltes des cochons contre sa politique, dans laquelle il cherche à les rassurer et les cajole, un peu.

Chers petits cochons, chères petites cochonnes, mes chers Amis,

Depuis quelque temps vous exprimez avec ardeur un certain « ras le bol » quant à ma conduite envers vous.

Je vous ai écoutés, je vous entends. Je ferai des efforts considérables pour que votre sûreté soit assurée au mieux de mon pouvoir. Je veillerai à ce que vous soyez mieux nourris pour que vous fassiez un meilleur lard et que vous ne courriez pas si vite. Le sport n’est pas bon pour vous. Peut-on raisonnablement aimer un cochon maigrelet ?

Vous nous dites que votre maigreur tient aux impôts qui vous écrasent et ne vous laissent que peu de pouvoir d’achat pour le frichti. Cela ne peut durer et j’y veillerai. Dans ce pays, plus de cochons étiques, telle est ma nouvelle éthique.

Je sais depuis toujours que vous êtes d’excellents individus, je dirais même de délicieuses personnes, car comme le dit souvent Mère Louve, « dans le cochon tout est bon ! » et ce n’est pas moi qui dirais le contraire.

Or donc votre sort va s’améliorer. Fini les huttes de paille et les maisons branlantes de bois infesté de capricornes, non ! On ne va vous construire des belles maisons en préfabriqué, elles sont tout de même plus faciles à détruire … euh ! Quand elles sont trop vieilles ! Les loups des banques vous aideront à vous endetter, cool Raoul, pour 25 ou 30 ans. Une fois éteinte votre dette, vous pourrez en contracter une autre et brader votre ruine à encore plus pauvre que vous. C’est aussi ça la solidarité intergénérationnelle entre porcidés. Soyez de bons cochons, entraidez-vous, l’état ne peut pas tout, surtout pour les cochons qui ne sont rien.

Vous voyez, je pense à vous et je veux votre bien, sans jeu de mots, rassurez-vous

Je vais tâcher d’alléger vos impôts, sans trop les alourdir pour les cochons riches parce qu’ils ruissellent, comme vous savez. Mais je suis un joueur de bonneteau redoutable et, vous le verrez bientôt, au casino de la vie c’est un atout primordial. Vous serez bluffés, donc vous ne remettrez pas ces horribles oripeaux caca d’oie qui vous enlaidissent. Je vous préfère nus et soyeux, la moindre des choses pour des cochons.

Maintenant et pour terminer, mettons-nous d’accord. Je suis un prédateur, je n’y suis pour rien, c’est ma maman qui m’a fait comme ça, prétend papa. J’ai été biberonné à la prédation dans toutes les bonnes écoles de loups où j’ai usé ma pelisse, en fait, je le confesse, je ne sais faire que ça. Vous, mes cochons (je dis mes parce que je vous aime) vous êtes de tout temps des proies. Qui puis-je ? Je vous le demande. La Nature est ainsi faite et depuis ma plus tendre enfance, mon éducation est fondée sur cette forte devise : « Il vaut mieux faire le boucher que le cochon ». Vous comprendrez donc que c’est culturel en même temps qu’inné.

Ce qui m’amène à vous dire ceci : certes, je vais ouvrir un grand débat réservé à la soue, il sera honnête, enfin presque. Hein ! il ne faut pas rêver non plus, mes petits gorets. Tout est prêt, les questions que vous poserez seront étudiées et nous mettrons de côté celles qui ne nous plairont pas. Il y en aura beaucoup, j’imagine. Je vais essayer, une fois n’est pas coutume, d’être moins intelligent et moins subtil, pour que vous compreniez ; bref de me mettre à la hauteur de votre petitesse.

Bon ! Je crois que j’ai fait le tour… Ah ! Encore une petite chose. Chers cochons, chères cochonnes, chers Amis ne comptez pas que je revienne sur mes acquis, ils sont autrement plus importants que les vôtres.

Duterroir

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