UNE ASSOCIATION NE PEUT ŒUVRER QU’À LA MESURE DU NOMBRE DE SES ADHÉRENTS
REJOIGNEZ L’ADLPF POUR LA RENFORCER DANS SES COMBATS EN FAVEUR DE LA LIBERTÉ DE CONSCIENCE ET DE LA RAISON

Accords « Kouchner – Vatican »

14 Juil 2010

ADLPF La Libre Pensée Laïcité Accords « Kouchner – Vatican »

Voici la réponse – négative – à notre recours en Conseil d’Etat concernant les accords « Kouchner – vatican » qui détricotent le monopole de collation des grades de l’Etat pour en faire bénéficier l’Eglise catholique et ses établissements d’enseignement supérieur.

Bonne lecture tout de même… et bonnes vacances malgré tout.

Cordialaïquement

Denis PELLETIER

CONSEIL D’ETAT

Nos 327663, 328052, 328122, 328127, 328614, 328679, 328832, 328924, 328927, 328931 et 329014

FEDERATION NATIONALE DE LA LIBRE PENSEE et autres

Mme Francine Mariani-Ducray

Rapporteur

  1. Rémi Keller

Rapporteur public

Séance du 25 juin 2010

Lecture du 9 juillet 2010

REPUBLIQUE FRANÇAISE

Le Conseil d’Etat statuant au contentieux

Sur le rapport de la section du contentieux

Vu, 1°, sous le n° 327663, la requête, enregistrée le 5 mai 2009 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, présentée par la FEDERATION NATIONALE DE LA LIBRE PENSEE, dont le siège est 12, rue des Fossés-Saint-Jacques à Paris (75005) ; la FEDERATION NATIONALE DE LA LIBRE PENSEE demande au Conseil d’Etat d’annuler pour excès de pouvoir le décret n° 2009-427 du 16 avril 2009 portant publication de l’accord entre la République française et le Saint-Siège sur la reconnaissance des grades et diplômes dans l’enseignement supérieur (ensemble un protocole additionnel d’application), signé à Paris le 18 décembre 2008 ;

Vu, 2°, sous le n° 328052, la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 18 mai 2009 et 19 juin 2009 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, présentés par M. Philippe CRISTOFARI, demeurant 2, rue Gaston Gadel à Perpignan (66100) ; M. CRISTOFARI demande au Conseil d’Etat :

D’annuler pour excès de pouvoir le décret attaqué sous le n° 327663 ;

De mettre les dépens à la charge de l’Etat ;

Vu, 3°, sous le n° 328122, la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 19 mai et 22 juillet 2009 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, présentée pour M. Yvon COLLIN, M. Nicolas ALFONSI, M. Jean-Michel BAYLET, M. Michel CHARASSE, Mme Anne-Marie ESCOFFIER, M. François FORTASSIN, Mme Françoise LABORDE, M. Daniel MARSIN, M. Jacques MEZARD, M. Jean MILHAU, M. Aymeri DE MONTESQUIOU, M. Jean-Pierre PLANCADE, M. Robert TROPEANO, M. Raymond VALL, qui élisent domicile au Palais du Luxembourg 15, rue de Vaugirard à Paris Cedex 06 (75291) ; M. COLLIN et autres demandent au Conseil d’Etat d’annuler pour excès de pouvoir le décret attaqué sous le n° 327663 ;

Vu, 4°, sous le n° 328127, la requête, enregistrée le 20 mai 2009 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, présentée pour M. Jean-Pierre BEL, Mme Françoise CARTRON, Mme Bariza KHIARI, M. Jean-Pierre SUEUR, Mme Jacqueline ALQUIER, Mme Michelle ANDRE, M. Alain ANZIANI, M. David ASSOULINE, M. Bertrand AUBAN, Mme Maryvonne BLONDIN, M. Yannick BODIN, M. Didier BOULAUD, Mme Claire-Lise CAMPION, M. Jean-Louis CARRERE, M. Pierre-Yves COLOMBAT, Mme Christiane DEMONTES, M. Claude DOMEIZEL, M. Jean-Luc FICHET, M. Bernard FRIMAT, M. Charles GAUTIER, M. Didier GUILLAUME, M. Edmond HERVE, Mme Annie JARRAUD-VERGNOLLE, Mme Virginie KLES, M. Serge LAGAUCHE, Mme Raymonde LE TEXIER, M. Roger MADEC, M. Jacques MAHEAS, M. François MARC, Mme Rachel MAZUIR, M. Jean-Pierre MICHEL, M. Robert NAVARRO, M. Jean-Marc PASTOR, Mme Giselle PRINTZ, M. Daniel RAOUL, M. François REBSAMEN, M. Daniel REINER, M. Michel TESTON, M. René TEULADE, M. Jean-Marc TODESCHINI, M. Richard YUNG, qui élisent domicile au Palais du Luxembourg 15, rue de Vaugirard à Paris Cedex 06 (75291) ; M. BEL et autres demandent au Conseil d’Etat :

D’annuler pour excès de pouvoir le décret attaqué sous le n° 327663 ;

D’annuler pour excès de pouvoir l’accord et le protocole additionnel ;

De mettre à la charge de l’Etat la somme de 4 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu, 5°, sous le n° 328614, la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 8 juin et 6 août 2009 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, présentés pour M. Marc ANTOINE, demeurant 108, avenue Philippe-Auguste à Paris (75011), Mme Catherine KINTZLER, demeurant 50, rue de la Justice à Paris (75020), M. Frédéric NAUD, demeurant 15, rue Cavalotti à Paris (75018), M. Alain SIMON, demeurant 72, rue Crozatier à Paris (75012), Mme Anne Marie SIEGFRIED, demeurant 36, rue des Lilas à Colombes (92700), M. Yann LE BIHEN, demeurant 95, rue Damrémont à Paris (75018), M. Samuel TOMEI, demeurant 9, rue Aristide Bruant à Paris (75018), M. Michel GILLET, demeurant 337, chemin de Clarisse à Trets (13530), M. Roger CORDIER, demeurant 2, place du Château à Bourgoin-Jallieu (38300), M. Jean-Christophe GARRIGUES, demeurant 13, rue Albrecht à Toulouse (31000), M. Joël DECHAUME, demeurant 8-B, rue Bienvenue à Marseille (13001), M. Loïc GOURDON, demeurant 22, rue Paul Ramadier à Nantes (44000), M. Gwénael JEZ

EQUEL, demeurant 9, rue Eugène Sud à Paris (75018), M. Jean RIEDINGER, demeurant 42 bis, avenue du Général Leclerc à Roville-devant-Bayon (54290), Mme Monique CABOTTE-CARILLON, demeurant 338, rue de la Fuye à Tours (37000), Mme Hélène FRANCO, demeurant 22, avenue Parmentier à Paris (75011), M. Patrick KESSEL, demeurant 59, boulevard des Batignolles à Paris (75008), M. Michel BOURDROIT, demeurant 23, rue du Général de Gaulle à Lançon-Provence (13680), M. Jean-Luc GALLINELLA, demeurant 163, rue de Vic à Nancy (54000), M. Fabien TAIEB, demeurant 15, boulevard des Invalides à Paris (75007), M. Jean-Michel QUILLARDET, demeurant 5, rue Le Goff à Paris (75005), M. Christian ALLONCIUS, demeurant 7, rue Armand Brette à Pierrefitte (93380), M. Christophe BREISSAC, demeurant 47 bis, boulevard de la République à Jouques (13490), M. Jacques DESALLANGRE, M. Pierre BOURGUIGNON, M. Christian BATAILLE, Mme Pascale CROZON, M. Gérard CHARASSE, M. Jean-Pierre BRARD, M. Marc DOLEZ, Mme Catherine LEMORTON, M. André GERIN, Mme Odile SAUGUES, M. Jean MALLOT, Mme Danielle BOUSQUET, M. Jean MICHEL, M. Bernard LESTERLIN, qui élisent domicile 126, rue de l’Université à Paris (75007), M. Jean-Luc MELENCHON, M. François AUTAIN, qui élisent domicile au 15, rue de Vaugirard à Paris (75006), LE GRAND ORIENT DE FRANCE, dont le siège est 16, rue Cadet à Paris (75009), L’UNION DES FAMILLE LAIQUES, dont le siège est 27, rue de la Réunion à Paris (75020), L’OBSERVATOIRE INTERNATIONAL DE LA LAICITE, dont le siège est 5, rue Le Goff à Paris (75005), LA FEDERATION DU DROIT HUMAIN, dont le siège est 5, rue Jules Breton à Paris (75013), LE COMITE 1905, dont le siège est 205, chemin des Incapis à Draguignan, LA GRANDE LOGE MIXTE UNIVERSELLE, dont le siège est 27, rue de la Réunion à Paris (75020), LE COMITE LAICITE REPUBLIQUE, dont le siège est 54, rue J.B. Pigalle à Paris (75009), L’OBSERVATOIRE DE LA LAICITE DE PROVENCE ET D’AIX, dont le siège est Place Romée de Villeneuve à Aix-en-Provence (13100), CHRETIENS POUR UNE EGLISE DEGAGEE DE L’ECOLE CONFESSION

NELLE, dont le siège est 100, rue de la Fuye à Tours (37000), LA GRANDE LOGE MIXTE DE FRANCE, dont le siège est 108, boulevard Edouard Vaillant à Aubervilliers (93300), LE CENTRE D’ACTION EUROPEENNE DEMOCRATIQUE ET LAIQUE, dont le siège est 129, rue Edouard Branly à Montreuil (93100), l’ASSOCIATION DES LIBRES PENSEURS DE FRANCE, dont le siège est 36, rue de Verdun à Damville (27240), LE CHEVALIER DE LA BARRE, dont le siège est 15, passage Ramey à Paris (75018), l’ASSOCIATION LAICITE 2005, dont le siège est 5, rue de l’Orient à Toulouse (31000), l’ASSOCIATION LAICITE LIBERTE, dont le siège est 49, rue des Réservoirs à Yerres (91330), ESPERANCE 54, dont le siège est Réseau du Parvis à Roville-devant-Bayon (54290) ; M. ANTOINE et autres demandent au Conseil d’Etat :

D’annuler pour excès de pouvoir le décret attaqué sous le n° 327663 ;

De mettre la somme de 3 000 euros à la charge de l’Etat au titre des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu, 6°, sous le n° 328679, la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 8 juin 2009 et 3 août 2009 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, présentés par Mme Juliette VALAT, demeurant 11, rue de la Tour d’Auvergne à Perpignan (66000) ; Mme VALAT demande au Conseil d’Etat :

D’annuler pour excès de pouvoir le décret attaqué sous le n° 327663 ;

De mettre les dépens à la charge de l’Etat ;

Vu, 7°, sous le n° 328832, la requête, enregistrée le 15 juin 2009 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, présentée par la FEDERATION NATIONALE FORCE OUVRIERE DE L’ENSEIGNEMENT, DE LA CULTURE ET DE LA FORMATION et le SYNDICAT NATIONAL DES PERSONNELS DE RECHERCHE ET ETABLISSEMENTS D’ENSEIGNEMENT SUPERIEUR, dont le siège est 6/8, rue Gaston Lauriau à Montreuil Cedex (93513) ; la FEDERATION NATIONALE FORCE OUVRIERE DE L’ENSEIGNEMENT, DE LA CULTURE ET DE LA FORMATION et le SYNDICAT NATIONAL DES PERSONNELS DE RECHERCHE ET ETABLISSEMENTS D’ENSEIGNEMENT SUPERIEUR demandent au Conseil d’Etat d’annuler pour excès de pouvoir le décret attaqué sous le n° 327663 ;

Vu, 8°, sous le n° 328924, la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 16 juin et 31 août 2009 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, présentés pour l’UNSA EDUCATION, dont le siège est 87 bis, avenue Georges Gosnat à Ivry-sur-Seine (94853) et la SUP’RECHERCHE-UNSA, dont le siège est 87 bis, avenue Georges Gosnat à Ivry-sur-Seine (94853) ; l’UNSA EDUCATION et la SUP’RECHERCHE-UNSA demandent au Conseil d’Etat :

D’annuler pour excès de pouvoir le décret attaqué sous le n° 327663 ;

De mettre la somme de 1 500 euros à la charge de l’Etat au titre des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu, 9°, sous le n° 328927, la requête, enregistrée le 16 juin 2009 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, présentée par la FEDERATION SYNDICALE UNITAIRE (FSU) ; la FEDERATION SYNDICALE UNITAIRE (FSU) demande au Conseil d’Etat :

D’annuler pour excès de pouvoir le décret attaqué sous le n° 327663 ;

De mettre la somme de 2 000 euros à la charge de l’Etat au titre des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu, 10°, sous le n° 328931, la requête, enregistrée le 16 juin 2009 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, présentée pour le SYNDICAT NATIONAL DE L’ENSEIGNEMENT SUPERIEUR – FSU, dont le siège est 78, rue du Faubourg Saint Denis à Paris (75010) ; le SYNDICAT NATIONAL DE L’ENSEIGNEMENT SUPERIEUR – FSU demande au Conseil d’Etat :

D’annuler pour excès de pouvoir le décret attaqué sous le n° 327663 ;

De mettre la somme de 3 500 euros à la charge de l’Etat au titre des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu, 11°, sous le n° 329014, la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 19 juin et 20 août 2009 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, présentés pour la LIGUE DE L’ENSEIGNEMENT, dont le siège est 3, rue Récamier à Paris Cedex 01 (75341) et la LIGUE DES DROITS DE L’HOMME, dont le siège est 38, rue Marcadet à Paris (75018) ; la LIGUE DE L’ENSEIGNEMENT et la LIGUE DES DROITS DE L’HOMME demandent au Conseil d’Etat :

D’annuler pour excès de pouvoir le décret attaqué  sous le n° 327663 ;

De mettre la somme de 4 000 euros à la charge de l’Etat au titre des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu, sous le n° 327663, la note en délibéré, enregistrée le 25 juin 2010, présentée par le ministre des affaires étrangères et européennes ;

Vu, sous le n° 328122, la note en délibéré, enregistrée le 25 juin 2010, présentée pour M. COLLIN et autres ;

Vu sous le n° 328927, la note en délibéré, enregistrée le 5 juillet 2010, présentée par la FEDERATION SYNDICALE UNITAIRE ;

Vu la Constitution ;

Vu la convention sur la reconnaissance des qualifications relatives à l’enseignement supérieur dans la région européenne, faite à Lisbonne le 11 avril 1997, publiée par le décret n° 2000-941 du 18 septembre 2000 ;

Vu le code de l’éducation ;

Vu la loi du 9 décembre 1905 concernant la séparation des Eglises et de l’Etat ;

Vu la loi n° 84-52 du 26 janvier 1984 ;

Vu le décret n° 53-192 du 14 mars 1953 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

Le rapport de Mme Francine Mariani-Ducray, Conseiller d’Etat,

Les observations de la SCP Monod, Colin, avocat de M. COLLIN et autres, à la SCP Defrenois, Levis, avocat de M. BEL et autres, à la SCP Tiffreau, Corlay, avocat de M. ANTOINE et autres, à la SCP Peignot, Garreau, avocat de l’UNSA EDUCATION et autres et à la SCP Roger, Sevaux, avocat de la LIGUE DE L’ENSEIGNEMENT et de la Ligue des Droits de l’homme ;

Les conclusions de M. Rémi Keller, rapporteur public,

La parole ayant été donnée à la SCP Monod, Colin, avocat de M. COLLIN et autres, à la SCP Defrenois, Levis, avocat de M. BEL et autres, à la SCP Tiffreau, Corlay, avocat de M. ANTOINE et autres, à la SCP Peignot, Garreau, avocat de l’UNSA EDUCATION et autres et à la SCP Roger, Sevaux, avocat de la LIGUE DE L’ENSEIGNEMENT et de la Ligue des Droits de l’homme ;

Considérant que les requêtes sont dirigées contre le même décret du 16 avril 2009 portant publication de l’accord entre la République française et le Saint-Siège sur la reconnaissance des grades et diplômes dans l’enseignement supérieur, signé à Paris le 18 décembre 2008, et de son protocole additionnel ; qu’il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision ;

Sans qu’il soit besoin de statuer sur la recevabilité des requêtes ;

Sur l’intervention présentée par M. GHILIONE et autres sous le n° 328614 :

Considérant que les associations qui ont présenté cette intervention ont, eu égard à leur objet, intérêt à l’annulation du décret attaqué ; que cette intervention est donc recevable ;

Sur les conclusions dirigées contre le décret attaqué :

En ce qui concerne le contrôle du Conseil d’Etat, statuant au contentieux :

Considérant qu’aux termes de l’article 53 de la Constitution : « Les traités de paix, les traités de commerce, les traités ou accords relatifs à l’organisation internationale, ceux qui engagent les finances de l’Etat, ceux qui modifient des dispositions de nature législative, ceux qui sont relatifs à l’état des personnes, ceux qui comportent cession, échange ou adjonction de territoire, ne peuvent être ratifiés ou approuvés qu’en vertu d’une loi./ Ils ne prennent effet qu’après avoir été ratifiés ou approuvés. (…) » ; que l’article 55 de la Constitution dispose : « Les traités ou accords régulièrement ratifiés ou approuvés ont, dès leur publication, une autorité supérieure à celle des lois, sous réserve, pour chaque accord ou traité, de son application par l’autre partie. » ;

Considérant qu’il résulte de la combinaison de ces dispositions que les traités ou accords relevant de l’article 53 de la Constitution et dont la ratification ou l’approbation est intervenue sans avoir été autorisée par la loi ne peuvent être regardés comme régulièrement ratifiés ou approuvés au sens de l’article 55 précité ; qu’il appartient au Conseil d’Etat, statuant au contentieux, en cas de recours pour excès de pouvoir contre un décret publiant un traité ou un accord, de connaître de moyens tirés, d’une part, de vices propres à ce décret, d’autre part, de ce qu’en vertu de l’article 53 de la Constitution, la ratification ou l’approbation de l’engagement international en cause aurait dû être autorisée par la loi ; que constitue, au sens de cet article, un traité ou un accord « modifiant des dispositions de nature législative » un engagement international dont les stipulations touchent à des matières réservées à la loi par la Constitution ou énoncent des règles qui diffèrent de celles posées par des dispositions de forme législative ; qu’en revanche, il n’appartient pas au Conseil d’Etat, statuant au contentieux de se prononcer sur la conformité du traité ou de l’accord à la Constitution ; qu’il ne lui appartient pas davantage de se prononcer sur la conformité d’un traité ou d’un accord à d’autres engagements internationaux ;

En ce qui concerne les moyens invoqués :

Quant aux moyens de forme et de procédure :

Considérant qu’aux termes de l’article 1er du décret du 14 mars 1953 relatif à la ratification et la publication des engagements internationaux souscrits par la France : « Le ministre des affaires étrangères est seul chargé de pourvoir à la ratification et la publication des conventions, accords, protocoles et règlements internationaux dont la France est signataire ou par lesquels la France se trouve engagée. (…) » ; qu’un décret portant publication d’un accord international n’appelle pas par lui-même de mesure d’exécution ; que par suite le moyen tiré de ce que le décret attaqué serait entaché de défaut de contreseing du ministre chargé de l’enseignement supérieur doit être écarté ;

Considérant qu’aucune disposition législative ou réglementaire n’imposait la consultation du Conseil supérieur de l’éducation ni du Conseil national de l’enseignement supérieur et de la recherche préalablement à l’intervention du décret portant publication de l’accord du 18 décembre 2008 et de son protocole additionnel ;

Quant aux moyens tirés de ce que la ratification du traité aurait dû être autorisée par la loi :

Considérant qu’aux termes de l’article 34 de la Constitution : « La loi détermine les principes fondamentaux (…) de l’enseignement » ;

Considérant qu’aux termes de son article 1er, l’accord sur la reconnaissance des grades et diplômes dans l’enseignement supérieur entre la République française et le Saint-Siège signé à Paris le 18 décembre 2008 a « pour objet : / 1. la reconnaissance mutuelle des périodes d’études, des grades et des diplômes de l’enseignement supérieur délivrés sous l’autorité compétente de l’une des Parties, pour la poursuite d’études dans le grade de même niveau ou dans un grade de niveau supérieur dans les établissements dispensant un enseignement supérieur de l’autre Partie, tels que définis à l’article 2 du présent accord ; / 2. la lisibilité des grades et des diplômes de l’enseignement supérieur délivrés sous l’autorité compétente de l’une des Parties par une autorité compétente de l’autre Partie. » ; qu’aux termes de son article 2, il s’applique : « Pour l’enseignement supérieur français : aux grades et diplômes délivrés sous l’autorité de l’Etat par les établissements d’enseignement supérieur. / Pour les Universités catholiques, les Facultés ecclésiastiques et les établissements d’enseignement supérieur dûment habilités par le Saint-Siège : aux grades et diplômes qu’ils délivrent dans les disciplines énumérées dans le protocole additionnel. Une liste des institutions ainsi que des grades et diplômes concernés sera élaborée par la Congrégation pour l’Education catholique, régulièrement tenue à jour et communiquée aux Autorités françaises. » ; que l’article 2 du protocole additionnel, intitulé « Information sur les grades et diplômes », mentionne les « diplômes délivrés par les universités catholiques et les établissements d’enseignement supérieur dûment habilités par le Saint-Siège » et les « diplômes ecclésiastiques directement délivrés par les facultés ecclésiastiques sous l’autorité du Saint-Siège » ; et qu’aux termes de l’article 3, intitulé « Reconnaissance des diplômes conférant un grade et entrant dans le champ d’application », du même protocole : « Pour l’application du présent protocole, le terme « reconnaissance » signifie qu’un diplôme obtenu dans l’une des Parties est déclaré de même niveau pour produire les effets prévus par l’Accord. / Sur requête préalable des intéressés, sont reconnus de même niveau : / a) Le doctorat français et les diplômes ecclésiastiques de doctorat ; / b) Les diplômes français de master (…) et les diplômes ecclésiastiques de licence ; / c) Le diplôme français de licence (…) et les diplômes ecclésiastiques de baccalauréat. / Les autorités compétentes pour la reconnaissance des diplômes sont (…) pour la poursuite d’études : / ― dans les établissements d’enseignement supérieur français : / l’établissement d’enseignement supérieur dans lequel souhaite s’inscrire l’étudiant ; (…) »

S’agissant de la collation des diplômes et des grades :

Considérant qu’aux termes de l’article L. 613-1 du code de l’éducation : « L’État a le monopole de la collation des grades et des titres universitaires. / Les diplômes nationaux délivrés par les établissements sont ceux qui confèrent l’un des grades ou titres universitaires dont la liste est établie par décret pris sur avis du Conseil national de l’enseignement supérieur et de la recherche. (…) ils ne peuvent être délivrés qu’au vu des résultats du contrôle des connaissances et des aptitudes appréciés par les établissements habilités à cet effet par le ministre chargé de l’enseignement supérieur (…) », et qu’aux termes de l’article L. 613-5 : « Les études, les expériences professionnelles, les acquis personnels peuvent être validés, dans des conditions définies par décret, en vue de l’accès aux différents niveaux de l’enseignement supérieur. » ; que si le législateur, par les dispositions codifiées à l’article L. 613-1, a réservé aux seuls établissements d’enseignement supérieur habilités à cet effet par le ministre chargé de l’enseignement supérieur l’attribution des diplômes nationaux qui confèrent des titres et grades universitaires, il a, par les dispositions codifiées à l’article L. 613-5, issues de l’article 5 de la loi du 26 janvier 1984 relative à l’enseignement supérieur, autorisé, au bénéfice de personnes qui ne sont pas titulaires de tels diplômes nationaux et grades universitaires, en vue de leur accès aux différents niveaux de l’enseignement supérieur public, la validation, notamment, d’études, sanctionnées ou non par des diplômes, que ces personnes ont accomplies y compris en dehors des établissements d’enseignement supérieur public, et a renvoyé au pouvoir réglementaire la définition des conditions de la validation d’études ou de diplômes à cette fin ;

Considérant que les stipulations de l’article 2 du protocole additionnel rappelées ci-dessus, qui sont de caractère informatif, n’édictent pas d’obligations particulières à l’égard des établissements d’enseignement supérieur public ; que les stipulations de l’article 3 de ce protocole sont relatives aux conditions de validation d’études ayant été sanctionnées par l’obtention d’un « diplôme ecclésiastique », par voie de reconnaissance de ce diplôme, en vue de l’accès aux différents niveaux de l’enseignement supérieur public ; qu’ainsi que le font valoir les ministres des affaires étrangères et européennes et de l’enseignement supérieur et de la recherche, la reconnaissance d’un « diplôme ecclésiastique » est, en vertu de ces stipulations, de la compétence des autorités de l’établissement dans lequel souhaite s’inscrire son titulaire ; qu’en vertu de l’article L. 613-5 précité, celles-ci, pour décider de reconnaître le diplôme du candidat, doivent tenir compte, d’une part, de l’équivalence de niveau édictée par le protocole, et, d’autre part, de l’aptitude du candidat à suivre des enseignements dans le grade et la formation postulés, appréciée en particulier au regard du contenu des études suivies ; qu’ainsi, ces stipulations n’autorisent pas des établissements d’enseignement supérieur privé à délivrer des diplômes nationaux et ne permettent pas aux bénéficiaires de titres délivrés par des établissements d’enseignement supérieur privés ayant reçu une habilitation par le Saint-Siège de se prévaloir, de ce seul fait, des droits attachés à la possession d’un diplôme national ou d’un grade universitaire ; qu’elles ne dérogent donc, ni à l’article L. 613-1 du code de l’éducation, ni à l’article L. 613-7 du même code, en vertu duquel les établissements d’enseignement supérieur privés, pour permettre à leurs étudiants de subir les contrôles nécessaires à l’obtention d’un diplôme national, peuvent conclure des conventions avec des établissements publics à caractère scientifique, culturel et professionnel, mais ont trait à des matières qui relèvent de la compétence du pouvoir réglementaire ;

S’agissant de l’utilisation du titre d’université :

Considérant qu’aux termes de l’article L. 731-14 du code de l’éducation : « Les établissements d’enseignement supérieur privés ne peuvent en aucun cas prendre le titre d’université. Les certificats d’études qu’ils jugent à propos de décerner aux élèves ne peuvent porter les titres de baccalauréat, de licence ou de doctorat. / Le fait, pour le responsable d’un établissement, de donner à celui-ci le titre d’université ou de faire décerner des certificats portant le titre de baccalauréat, de licence ou de doctorat, est puni de 30 000 euros d’amende. » ; que la circonstance que l’accord et le protocole publiés par le décret attaqué, qui ne portent pas exclusivement sur des établissements situés en France, mentionnent les termes d’ « université catholique », n’a pas pour effet d’instituer, au bénéfice d’établissements d’enseignement supérieur privés implantés sur le territoire national, une dérogation à ces dispositions législatives qui les autoriserait à faire usage de la dénomination d’ « université » ;

S’agissant de la laïcité :

Considérant que les requérants soutiennent que les stipulations de l’accord et de son protocole additionnel créent à l’encontre des établissements d’enseignement supérieur publics une emprise ou une discrimination fondées sur l’appartenance religieuse, et reconnaissent, salarient ou subventionnent un culte, introduisant par là une exception au principe de la séparation des Eglises et de l’Etat ;

Considérant qu’aux termes de l’article L. 141-6 du code de l’éducation : « Le service public de l’enseignement supérieur est laïque et indépendant de toute emprise politique, économique, religieuse ou idéologique (…). », et qu’aux termes de l’article 2 de la loi du 9 décembre 1905 concernant la séparation des Eglises et de l’État : « la République ne reconnaît, ne salarie ni ne subventionne aucun culte. » ; que, d’une part, l’accord et son protocole additionnel ne comportent aucune stipulation permettant qu’un culte soit salarié ou subventionné ; que, d’autre part, ainsi qu’il a été dit, l’équivalence de niveaux de « diplômes ecclésiastiques » prévue par les stipulations de l’accord et du protocole additionnel ne confère pas à elle seule aux personnes qui en bénéficient de droit particulier à poursuivre des études dans l’établissement dans lequel elles souhaitent s’inscrire ; qu’elles ne font prévaloir ainsi aucun critère religieux ni aucune considération de la pratique éventuelle d’un culte pour l’accès à l’enseignement supérieur public et ne portent, par suite, sur aucune des matières relevant du domaine de la loi qui sont régies par les dispositions précitées ;

S’agissant des autres moyens tirés de la méconnaissance de l’article 53 de la Constitution :

Considérant que la circonstance que l’accord a été signé par le Saint-Siège n’a pas pour effet de lui donner un objet relatif à une organisation internationale ;

Considérant que si, selon son article 1er, l’accord a notamment pour objet « la lisibilité des grades et diplômes de l’enseignement supérieur délivrés sous l’autorité compétente de l’une des parties par une autorité compétente de l’autre partie », les stipulations prévues à cette fin par l’accord et son protocole additionnel, de caractère informatif, ne touchent à aucune des matières relevant du domaine de la loi ; que le moyen tiré de ce qu’elles porteraient atteinte à des lois relatives au marché du travail n’est assorti d’aucune précision permettant d’en apprécier le bien-fondé ;

Considérant enfin qu’aucune des stipulations de l’accord et de son protocole additionnel ne concerne les conditions d’exercice d’une liberté publique ;

Quant au moyen tiré, par voie d’exception, de l’illégalité du décret ayant approuvé la convention de Lisbonne :

Considérant que, si le décret attaqué mentionne dans ses visas le décret du 18 septembre 2000 qui porte publication de la convention sur la reconnaissance des qualifications relatives à l’enseignement supérieur dans la région européenne, signée à Lisbonne le 11 avril 1997, il n’est pas pris pour l’application de celui-ci ; que le moyen tiré d’une exception d’illégalité du décret du 18 septembre 2000 est ainsi, en tout état de cause, inopérant ;

Quant aux moyens tirés de ce que l’accord et le protocole additionnel publiés méconnaîtraient la Constitution et la convention de Lisbonne :

Considérant qu’ainsi qu’il a été dit ci-dessus, il n’appartient pas au Conseil d’Etat statuant au contentieux de se prononcer sur la conformité à la Constitution de l’accord et du protocole publiés par le décret attaqué ; qu’il ne lui appartient pas non plus de se prononcer sur la conformité de ceux-ci à d’autres engagements internationaux ; que, par suite, les moyens formulés à ce titre ne peuvent qu’être écartés ;

Considérant qu’il résulte de tout ce qui précède que les requérants ne sont pas fondés à demander l’annulation du décret attaqué ;

Sur les conclusions tendant à l’annulation de l’accord et du protocole additionnel :

Considérant que ces conclusions ne peuvent qu’être rejetées comme irrecevables ;

Sur les conclusions tendant à l’application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de cet article font obstacle à ce que soient mises à la charge de l’État, qui n’est pas dans la présente instance la partie perdante, les sommes que demandent les requérants au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : L’intervention de M. GHILIONE et autres est admise.

Article 2 : Les requêtes de la FEDERATION NATIONALE DE LA LIBRE PENSEE, de M. Philippe CRISTOFARI, de M. Yvon COLLIN et autres, de M. Jean-Pierre BEL et autres, de M. Marc ANTOINE et autres, de Mme Juliette VALAT, de la FEDERATION NATIONALE FORCE OUVRIERE DE L’ENSEIGNEMENT et du SYNDICAT NATIONAL DES PERSONNELS DE RECHERCHE ET ETABLISSEMENTS D’ENSEIGNEMENT SUPERIEUR, DE LA CULTURE ET DE LA FORMATION et autres, de l’UNSA EDUCATION et SUP’RECHERCHE UNSA, de la FEDERATION SYNDICALE UNITAIRE, du SYNDICAT NATIONAL DE L’ENSEIGNEMENT SUPERIEUR – FSU, de la LIGUE DE L’ENSEIGNEMENT et de la LIGUE DES DROITS DE L’HOMME sont rejetées.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à la FEDERATION NATIONALE DE LA LIBRE PENSEE, à M. Philippe CRISTOFARI, à M. Yvon COLLIN, premier requérant dénommé sous le n° 328122, les autres requérants étant informés de la présente décision par la SCP Monod, Colin, avocat au Conseil d’Etat et à la Cour de cassation, qui les représente devant le Conseil d’Etat, à M. Jean-Pierre BEL, premier requérant dénommé sous le n° 328127, les autres requérants étant informés de la présente décision par la SCP Defrenois, Levis, avocat au Conseil d’Etat et à la Cour de cassation, qui les représente devant le Conseil d’Etat, à M. Marc ANTOINE, premier requérant dénommé sous le n° 328614, les autres requérants étant informés de la présente décision par la SCP Tiffreau, Corlay, avocat au Conseil d’Etat et à la Cour de cassation, qui les représente devant le Conseil d’Etat, à Mme Juliette VALAT, à la FEDERATION NATIONALE FORCE OUVRIERE DE L’ENSEIGNEMENT, DE LA CULTURE ET DE LA FORMATION et au SYNDICAT NATIONAL DES PERSONNELS

DE RECHERCHE ET ETABLISSEMENTS D’ENSEIGNEMENT SUPERIEUR, à l’UNSA EDUCATION et SUP’RECHERCHE UNSA, à la FEDERATION SYNDICALE UNITAIRE, au SYNDICAT NATIONAL DE L’ENSEIGNEMENT SUPERIEUR – FSU, à la LIGUE DE L’ENSEIGNEMENT et la LIGUE DES DROITS DE L’HOMME, au ministre de l’éducation nationale, porte-parole du Gouvernement, au ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche, au ministre des affaires étrangères et européennes, au Premier ministre, à M René GHILIONE, premier auteur dénommé de l’intervention, les autres auteurs de l’intervention étant informés de la présente décision par la SCP Tiffreau, Corlay, avocat au Conseil d’Etat et à la Cour de cassation, qui les représente devant le Conseil d’Etat.

Délibéré dans la séance du 25 juin 2010 où siégeaient : M. Jean-Marc Sauvé, Vice-Président du Conseil d’Etat, Président ; M. Bernard Stirn, M. Yves Robineau, Mme Yannick Moreau, Mme Marie-Dominique Hagelsteen, M. Pierre-François Racine, M. Michel Pinault, M. Olivier Schrameck, Présidents de section ; M. Philippe Martin, M. Christian Vigouroux, M. Jacques Arrighi de Casanova, Présidents adjoints de la section du contentieux ; M. Edmond Honorat, Mme Sylvie Hubac, M. Alain Ménéménis, M. Rémy Schwartz, M. Marc Dandelot, Présidents de sous-section et Mme Francine Mariani-Ducray, Conseiller d’Etat-rapporteur.

Lu en séance publique le 9 juillet 2010.

Le Président :

Signé : M. Jean-Marc Sauvé

Le Conseiller d’Etat-rapporteur :

Signé : Mme Francine Mariani-Ducray

Le secrétaire :

Signé : Mme Claire James

La République mande et ordonne au ministre de l’éducation nationale, au ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche et au ministre des affaires étrangères et européennes, chacun en ce qui les concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

Le secrétaire

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